Deux églises face aux défis du temps

Publié le 6 novembre 2025

La capitale conserve en son cœur des édifices témoins de plusieurs siècles d’Histoire. Parmi eux, Notre-Dame-des-Champs dans le 6ᵉ arrondissement et Saint-Gervais-Saint-Protais dans le 4ᵉ arrondissement se distinguent par leur richesse architecturale et artistique. Ces monuments font aujourd’hui l’objet d’importants projets de restauration afin de préserver leur patrimoine face aux aléas du temps et aux dommages récents.

Deux églises face aux défis du temps

Notre-Dame-des-Champs :
de la légende au chantier contemporain

L’église Notre-Dame-des-Champs témoigne du dynamisme du quartier au XIXᵉ siècle. Construite entre 1867 et 1876 sur les plans de Paul-René-Léon Ginain, elle marque une étape significative de l’urbanisation du quartier du Montparnasse, alors en pleine expansion.

Mythes et histoires

Si l’édifice actuel date du XIXᵉ siècle, l’Histoire du site est plus ancienne. Selon certains récits hagiographiques, et d'autres légendaires, un temple dédié à Mercure aurait occupé le lieu au début de notre ère. Transformé en prieuré bénédictin sous le règne de Robert le Pieux, il prend d'abord le nom de Notre-Dame-des-Vignes. Au XVIIᵉ siècle des Carmélites espagnoles s'y installent et le site devient Notre-Dame-des-Champs. La construction de l’église actuelle se fait finalement sur l’emplacement d’un ancien hôtel de chasse, à un kilomètre seulement de l'emplacement d'origine.

 Développement urbain et industriel

Avec l’ouverture des gares Montparnasse (1840) et Denfert-Rochereau (1846), le quartier connaît une expansion démographique rapide, attirant de nombreux travailleurs, essentiellement bretons. Pour répondre aux besoins d’une population en forte croissance, une paroisse provisoire est créée en 1858. Les fidèles se retrouvent rue de Rennes, dans une chapelle en bois surnommée Notre-Dame-des-Planches. La nécessité de construire un édifice pérenne devient rapidement évidente.

Pour élever l'église rapidement et efficacement, Ginain fait appel à la Chèvre-Roulante, invention de Joseph-Désiré Courté. Montée sur rails, cette machine permet de déplacer et d’installer de lourds blocs de pierre avec une grande précision. Médaillée d’argent à l’Exposition Universelle précédente, elle illustre l’esprit d’innovation technique de l’époque. Elle répond aussi parfaitement à l’urgence liée à l’essor urbain et industriel du quartier, qui nécessite un lieu capable d’accueillir rapidement la communauté grandissante.

Application de la Chèvre-Roulante à la construction de l’église Notre-Dame-des-Champs à Paris en 1868
© Bibliothèque nationale de France.

Des décors uniques

L’intérieur de l’église est quant-à-lui richement décoré. Il est aussi particulièrement remarquable pour la cohérence et l’harmonie de ses décors, réalisés presque entièrement par des artistes et artisans contemporains à la construction de l'édifice. La nef comporte vingt-deux toiles marouflées de Joseph Aubert, illustrant différents épisodes de la vie de la Vierge. À ces toiles s’ajoutent plusieurs œuvres monumentales, dont le Repos de la Sainte Famille de Félix-Henri Giacomotti, qui orne la chapelle Saint-Joseph, et le Sacré-Cœur de François Lafon abrité par la chapelle éponyme.

Notre-Dame des Champs incendiée

Le mercredi 25 juillet dernier, l'orgue de chœur de l'église est victime d’un incendie. Certainement causé par une défaillance électrique, il est rapidement maîtrisé par les pompiers mais produit toutefois de nombreux dommages à l’édifice. Les dégâts constatés sont la présence d’eau et de suif dans la nef, ainsi que la disparition de l'instrument.

Le lendemain, jeudi 26 juillet, un second incendie se déclare vers 17h, de nature criminelle cette fois. Démarré dans chapelle Saint-Joseph, il détruit rapidement une statue en bois et une partie de la toile marouflée de Giacomotti.

Le projet du chantier de restauration comprend :

  • la consolidation et nettoyage de la toile ;
  • la restitution des parties manquantes ;
  • le nettoyage des murs de la chapelle, fortement noircis par la suie.

La découverte, après les incendies, d’une partie de la toile originale cachée sous un lambris permet aujourd’hui d’envisager la restitution complète de l’œuvre !

 

Saint-Gervais-Saint-Protais :
un patrimoine millénaire

L’église Saint-Gervais-Saint-Protais possède une histoire tout aussi ancienne. Une première chapelle, construite au Ve ou VIᵉ siècle, est implantée à proximité d’un cimetière gallo-romain. Cette chapelle devient ensuite une église gothique consacrée en 1420, puis se transforme progressivement. Elle atteint sa forme actuelle en 1657 après 150 ans d’agrandissements et d’adaptations. Au cours de ces travaux, elle est dotée de chapelles latérales, d’une façade classique tripartite et de nombreux vitraux.

 

Les vitraux de Saint-Gervais-Saint-Protais

L’église conserve également un ensemble de vitraux dressés progressivement, qui témoignent des nombreuses étapes de construction. Des cinq verrières de 1550, trois sont parvenues jusqu’à nous, moyennant quelques ajout au XIXᵉ siècle. Les deux autres verrières du chœur, aujourd’hui disparues, ont été remplacées en 2003 par des créations de Claude Courageux. L'artiste a ensuite réalisé neuf autres baies dans l’édifice. En 1993 déjà, Sylvie Gaudin avait participé au renouvellement des verrières en parant Saint-Gervais-Saint-Protais de cinq baies abstraites.

Evènements récents 

En mai 2025, cependant, une tempête de grêle a endommagé deux baies de la façade, dont une verrière contemporaine. Ces vitraux, aujourd'hui criblées d'impacts, méritent une restauration attentive pour garantir leur intégrité. Les nombreux impacts menacent aussi l’étanchéité de l’édifice et, par extension, son mobilier et ses œuvres.

 

 

Le chantier engagé pour Saint-Gervais-Saint-Protais vise donc la restauration des deux verrières de façade, touchées par la grêle. L'objectif de ce chantier est pluriel :

  • protéger le grand orgue et le mobilier ancien ;
  • préserver l'intégrité des verrières contemporaines ;
  • garantir la pérennité du patrimoine historique de l’église.

 

Patrimoine en mouvement :
enjeux et perspectives

Les projets de restauration de Notre-Dame-des-Champs et de Saint-Gervais-Saint-Protais illustrent la complexité de la conservation du patrimoine à Paris. Les incendies, tempêtes et impacts du temps mettent en péril des œuvres uniques et des architectures historiques. 

 

La mise en valeur de ces monuments ne se limite pas à la reconstruction ou au nettoyage : elle inclut la restauration des peintures et toiles, la préservation des matériaux anciens, et la protection des éléments mobiliers et instruments témoins de siècles d’Histoire.

 

Chaque don compte !
Participez aux chantiers de restauration.

 

Ces deux chantiers rappellent combien la mobilisation patrimoniale est nécessaire pour que le les monuments continuent à raconter l’Histoire de Paris et à s’inscrire dans la vie urbaine contemporaine. La restauration de la chapelle Saint-Joseph de Notre-Dame-des-Champs et des verrières de Saint-Gervais-Saint-Protais promettent de redonner tout leur éclat à ces lieux emblématiques, tout en sécurisant leurs œuvres et éléments structurels pour les générations futures.

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